Les zones aveugles du manager HPI : trop d’exigence

Dans mon article d’avril dernier, je vous parlais des zones aveugles des managers HPI : attitudes inadaptées voire dures, difficultés à expliquer leurs cheminements intellectuels, en particulier avec leur raisonnement en arborescence, à ne pas larguer leur entourage avec leur vitesse, qui les conduit à de l’impatience, créativité débordante qui confine parfois à l’éparpillement, et haut niveau d’exigence entre autres.

Les HPI ne se perçoivent pas comme différents

Je voudrais aujourd’hui vous proposer un zoom sur ce dernier sujet. Comme je l’ai déjà souligné, les HPI ne se perçoivent pas comme différents, malgré le fait qu’ils ont ce sentiment permanent de décalage par rapport aux autres. Pourquoi ?

  • Leur humilité naturelle les conduit à se sentir « comme les autres », ou à le vouloir tellement fort qu’ils font comme si.
  • Leur empathie fait qu’ils ont un fort besoin d’être acceptés, intégrés au groupe et à la société, ce qui les conduit à développer des attitudes d’adaptation permanente aux autres, comme de véritables caméléons qui cherchent à se fondre dans la masse
  • Et enfin, leur haut niveau d’exigence les conduit à ne pas voir leurs domaines d’excellence, à avoir un sentiment d’imposture, et leur donne donc le sentiment d’être moyen, comme tout le monde.

Etant non conscients de leur différence, ils ne peuvent pas imaginer que leur niveau d’exigence soit anormal, trop élevé pour la plupart des gens, et en particulier pour leurs collaborateurs.

L’écart en termes d’attentes avec leurs collaborateurs est d’autant plus élevé que les HPI managers sont souvent sous-employés

Par leurs différences criantes avec le reste de l’entreprise, les HPI sont souvent incompris et mal jugés. Et même quand ils réussissent plutôt bien, et qu’ils deviennent managers, ils sont souvent sous-employés.

Et de ce fait, les collaborateurs qu’ils encadrent peuvent être en décalage encore plus important avec eux, en terme de vitesse de réflexion et d’action.

Mon expérience de manager

Lorsque j’étais directeur du pôle entrepreneuriat à la CCI d’Ille et Vilaine, je voulais sans cesse conduire plus de nouveaux projets, plaçant en continu mon équipe (4 chefs de service et une quarantaine de collaborateurs) et moi-même en situation de surcharge.

En particulier, j’avais décidé de mettre en œuvre une transformation du métier de conseiller à la création d’entreprise. Pour faire simple, auparavant ceux-ci avaient pour mission d’informer et de former les porteurs de projet sur les grandes étapes clés pour pérenniser son activité : étude de marché, positionnement et démarche commerciale, communication, gestion comptable et financière, gestion de projet, juridique …

Mais nous avions constaté que nos clients porteurs d’un projet de création rechignaient à écouter nos conseils, parce qu’ils avaient surtout besoin d’être écoutés et rassurés. Nous devions donc muter vers un métier intégrant une véritable dimension de coaching, et plus seulement de conseil.

Et dans ce cadre, mon attention se portant toujours sur le point d’arrivée de ce projet de transformation, et j’exprimais donc souvent de l’impatience et de l’insatisfaction. J’ai donc inconsciemment épuisé et inquiété mes équipes – à commencer par mes chefs de service, alors même que je pensais avoir un management empathique et protecteur.

Le parallèle avec l’éducation des enfants

Pour ceux qui sont managers et parents, ils peuvent souvent faire des parallèles entre la façon de manager leurs collaborateurs, et l’éducation de leurs enfants. Bien sûr, une différence majeure est que vos enfants n’ont pas de contrat qui les engage avec vous, ni de salaire pour faire ce que vous attendez d’eux. Mais dans les deux cas, votre objectif est de les faire grandir, leur permettre de progresser pour atteindre leurs objectifs.

Combien de parents sont trop exigeants avec leurs enfants ? Il est vrai que l’on veut tous le meilleur pour eux, qu’ils s’en sortent financièrement, et paradoxalement l’ascenseur social n’est plus ce qu’il était, d’où cette pression que l’on se met, et qu’on leur transmet. Dans le cas des parents HPI, ce peut être encore plus.

Pour ma part, même si mes enfants réussissaient très bien à l’école, je voulais qu’ils fassent encore mieux que moi et j’étais hyper exigeant (comme je le suis avec moi-même). Certes je ne leur ai jamais dit de cette façon, mais je suis convaincu qu’ils devaient le sentir. Et comme je cherchais toujours la perfection dans tout ce que je fais, imaginez la pression sur les épaules de mes deux enfants ? Pour moi je ne faisais que mon rôle de père, les pousser au maximum pour les faire grandir, mais eux recevaient une pression qui pouvait les paralyser et les faire fuir.

Pas de feed-back de la part de votre entourage

Vous imaginez peut-être que, si par cas vous êtes trop exigeant, on va vous le faire savoir ? Mais il n’en est rien la plupart du temps, pour plusieurs raisons :

  • Vos collaborateurs n’osent pas vous le dire par peur d’être mal jugés ou notés, même s’il vous semble que vous êtes très ouvert à la discussion
  • N’ayant pas toujours d’autre référence que vous comme manager, ils peuvent penser que ce sont eux qui ne sont pas bons (on voit donc bien l’impact potentiel à long terme de l’excès d’exigence sur la confiance en soi de nos collaborateurs)
  • Vos collatéraux ne se permettront jamais de commenter votre façon de manager, car ils ne s’en sentent pas la légitimité, et car ils sont en concurrence avec vous (d’une certaine façon)
  • Vos managers seraient les mieux placés pour vous aider, mais certains manquent de courage managérial pour vous dire les choses clairement.

Et puis, êtes-vous pleinement prêt à entendre leurs feed-backs ? Si ceux-ci le font de façon un peu brutale, vous aurez sans doute tendance à repousser cette idée, parce que difficile à supporter pour votre sensibilité, et pour votre estime de vous-même. Et comme celle-ci a été érodée depuis longtemps par l’incompréhensions des autres …

Quelles solutions pour sortir de cette zone aveugle ?

On le voit bien, par peur des impacts pour eux-mêmes, ce ne sont pas les autres qui vont vous exprimer leur propre perception des choses, et ainsi vous aider à objectiver la situation. Vous devez donc prendre conscience, par vous-même, de cette différence fondamentale par rapport à la majorité des autres, dans vos modes de fonctionnement. Et en particulier dans votre haut niveau d’exigence.

Une grande particularité des HPI, c’est justement le refus de voir l’évidence : ils ont une différence majeure. Il n’y a aucun jugement en cela, ni de survalorisation, ni de sous-valorisation par rapport aux autres. Et puis on est comme on est ! La clé pour sortir de ses zones aveugles réside donc d’abord dans la prise de conscience des choses. Pour certains de mes clients, c’est grâce à leurs enfants qui ont été détectés, et qui par effet miroir leur renvoient cette révélation.

Une fois cette prise de conscience faite, l’étape d’après est l’acceptation, et c’est loin d’être simple. Et souvent, les HPI ont souffert de l’incompréhension et du jugement négatif de leur différence, il y a donc aussi un travail à faire sur l’estime de soi. Tout ceci ne peut se faire seul. Pourtant c’est le réflexe naturel quand on est HPI, on sait tellement faire bien un tas de choses ! Sauf quand il s’agit de travailler sur soi-même.

Pour en savoir plus sur ce sujet, suivez ma Masterclass du mardi 10 octobre prochain à 18h00.

Plus d’informations ici.

Inscription (gratuite et obligatoire) ici.

Cyril Barbé

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