Mardi 10 mai 2022, j’animais un premier webinaire LinkedIn Live destiné aux multi-potentiels, sur le thème « Multi-potentiels, boostez votre épanouissement professionnel ».
Phénomène de mode ou réalité ?
Les multi-potentiels, aussi nommés HPI (Hauts Potentiels Intellectuels), ou surdoués (« gifted » en anglais, qui signifie plutôt « dotés d’une capacité particulière), correspondent à une petite partie de la population (environ 2%), et constituent un phénomène encore très méconnu, malgré une récente mode autour de ces sujets.
Cette mode est liée au fait que, à l’origine les HPI sont définis par leur QI (supérieur à 130), et que l’école a progressivement donné à ces élèves un statut particulier, par exemple en les rassemblant dans des classes spécifiques dites d’élèves « précoces », et en leur faisant sauter des classes. Ce statut a vite attisé les convoitises des familles, voyant en cette « élite » une façon de démarquer leurs progéniture, et leur assurer ainsi une réussite future dans la vie active, du moins c’est ce qu’ils espèrent.
Or d’une part, le phénomène HPI est certes assez bien connu chez les enfants, mais très peu d’études scientifiques se sont penchées sur la question des adultes que sont devenus ces enfants. Et on commence à constater que le QI n’est pas nécessairement un gage de réussite professionnelle. Il y a donc bien une réalité des adultes surdoués, qui n’est pas si simple à vivre comme je l’explique plus loin.
Une vision liée au QI simpliste et stigmatisante
Et d’autre part, la compréhension de cette spécificité est très influencée par l’approche qu’en a l’école, c’est-à-dire limitée aux seules questions de QI. Or depuis les travaux de Howard Gardner sur les intelligences multiples, on sait que le QI ne mesure qu’une partie infime des formes possibles d’intelligences, et posséder un haut QI n’est donc en aucun cas un gage de supériorité par rapport aux autres.
Voilà pourquoi je préfère largement ce terme de multi-potentiels, qui d’une part exprime plus clairement une des spécificités des HPI (leur intérêt pour un très grand nombre de sujets ou domaines), et d’autre part évite une forme de stigmatisation par rapport au reste de la population, qui, en creux, serait en quelque sorte d’un potentiel intellectuel moyen, voire limité.
Au contraire, je considère que chaque être humain possède une forme d’intelligence qui lui est propre, une forme d’excellence, une combinaison de forces bien particulières, qui doit lui permettre d’apporter quelque chose d’unique au monde. Y compris par exemple les déficients mentaux (ou ceux que l’on nomme comme tels), dont on sait pour certains qu’ils sont dotés d’une intelligence émotionnelle hors du commun, qui manque par ailleurs cruellement à certaines personnes dites normales.
Une confusion avec les hauts-potentiels de l’entreprise
L’autre problème que pose l’expression « HPI » dans le monde professionnel, est qu’il entretient une confusion avec le terme « haut-potentiel », qui est utilisée par les dirigeants et les RH pour désigner les collaborateurs dont on pense qu’ils ont un potentiel pour évoluer fortement au sein de l’organisation. Or il est clair que ce ne sont pas nécessairement les mêmes personnes, et tant mieux.
En résumé, il y a donc :
- Les multi-potentiels, dont une des spécificités est de s’intéresser à un très grand nombre de sujets.
- Et les « experts » qui s’intéressent à un nombre de sujets ou de domaines plus restreint, et en deviennent ainsi des experts plus approfondis.
Quelles sont donc les spécificités des multi-potentiels ?
Ces spécificités résident essentiellement dans leur mode de fonctionnement, assez radicalement différent des autres, et notamment :
- Une vitesse de pensée, d’observation, de compréhension, d’élocution, et d’action, hors normes.
- Une pensée arborescente, qui leur fait sans cesse passer d’une idée à une autre, à avoir mille idées à la minute, à être très créatif et inventif
- Une énergie infinie sur ses sujets d’intérêt et en lien avec leurs valeurs, ils semblent infatigables et travaillent souvent plus que la moyenne, parfois de façon addictive jusqu’au burn-out.
- Un très haut niveau d’exigence, de perfectionnisme, voire d’intransigeance.
- Un besoin permanent d’apprendre, d’être nourris par de nouvelles connaissances, qui les conduit à très vite à l’ennui. Une tendance à commencer mille choses, mais ne rien finir, ou à l’inverse à procrastiner.
- Un caractère indépendant, une certaine aisance à critiquer les autres, comme eux-mêmes.
- Une forte capacité à conceptualiser, qui donne d’eux une image de rêveurs, voire personnalités compliquées.
- Une sensibilité exacerbée de 1 ou plusieurs des 5 sens (goût, odorat, vue, ouïe, toucher), qui leur fait insupporter certaines situations d’odeurs ou de bruits très forts, par exemple.
- Une empathie surdéveloppée, ils supportent difficilement des images, des récits, de situations humaines pénibles ou de traumatismes. Vivant régulièrement des montagnes russes émotionnelles, certains d’entre eux se « blindent » très jeunes pour ne plus rien ressentir, et paradoxalement peuvent donner l’image d’être dénués de sensibilité.
- Cette forte empathie, combinée à leur capacité naturelle à se remettre sans cesse en cause, les conduit à avoir une très forte humilité, et parfois un sentiment d’imposture en toutes situations.
Pourquoi s’intéresser aujourd’hui aux multi-potentiels ?
Toutes ces caractéristiques constituent tout à la fois un inconvénient majeur, et un avantage déterminant dans le monde professionnel.
Un inconvénient d’abord, car ils ont en général du mal à se faire comprendre des autres, et à comprendre les autres, qui génère des difficultés de communication et relationnelles régulières, voire d’intégration au sein d’une équipe, or on sait à quel point cette intégration est essentielle aujourd’hui pour réussir sa carrière.
Un autre inconvénient ensuite, car ils vont tellement vite pour tout (réfléchir, observer, comprendre, agir …) qu’ils peuvent tout à la fois décontenancer et créer des jalousies autour d’eux.
Mais ils ont aussi un avantage déterminant, car ils disposent de capacités et prédispositions particulières pour gérer la complexité, et l’incertitude, et l’accélération du temps que nous vivons tous toujours plus aujourd’hui.
Mais le problème est que la plupart des multi-potentiels s’ignorent, et n’imaginent pas un seul instant être différent des autres, alors même qu’ils ressentent ces différences de fonctionnement au quotidien. Plus exactement, ils auraient tendance à se considérer comme normaux, et à ne pas comprendre que les autres ne soient pas comme eux. La méconnaissance du phénomène chez les adultes, seulement révélé depuis quelques années par des ouvrages pionniers (*), est une raison de plus pour que les intéressés eux-mêmes se sentent totalement démunis dans leurs difficultés.
(*) Des ouvrages tels que « Trop intelligent pour être heureux ? L’adulte surdoué » de Jeanne Siaud-Facchin, ou « Je pense trop. Comment canaliser ce mental envahissant ? » de Christel Petitcollin, entre autres.
Permettre le plein épanouissement professionnel des multi-potentiels : un double enjeu stratégique
Dès lors, permettre aux multi-potentiels de prendre conscience de leur spécificité constitue une pierre fondatrice dans le fait, d’une part, de les aider à pleinement s’épanouir au plan professionnel, mais aussi à permettre aux entreprises qui les emploient de surmonter des obstacles qui leurs semblaient infranchissables jusqu’alors, ou de franchir des bonds en avant considérables leur donnant au passage durablement un temps d’avance.
En savoir plus : suivez ma Masterclass HPI du mardi 10 mai 2022.