Chef cuisinier du milieu du XIXè siècle, Auguste Escoffier (1846–1935), a codifié, modernisé et professionnalisé la grande cuisine. Il est le créateur du concept de brigade, l’auteur de plus de 5000 recettes, formalisées dans le Guide Culinaire, considéré encore aujourd’hui comme la bible des plus grands chefs plus de 100 ans après.
En collaboration avec César Ritz, il a aussi été à l’origine de la création de l’hôtellerie de grand luxe, et en particulier des restaurants gastronomiques, à Paris, Monte-Carlo, Lucerne, ou encore Londres.
En quoi l’exemple d’Auguste peut-il être inspirant pour les HPI / multi-potentiels, en particulier pour leur plein épanouissement professionnel ? Comment peuvent-ils, eux aussi, faire de leur personnalité atypique une brillante réussite dans une société de plus en plus normative ? Découvrez-le dans cet article.
En quoi Auguste peut-il être considéré comme multi-potentiel ?
Un observateur hors-pair et un améliorateur né
Lorsqu’il était commis de cuisine dans les années 1860, il a su faire le constat de tout ce qui pouvait être amélioré : hygiène, recettes, conditions de travail, organisation et répartition du travail.
Une insatiable curiosité
Très tôt, il dépasse la simple exécution des recettes dont il avait la charge, pour s’intéresser à l’organisation des cuisines, à l’écriture, à l’art de recevoir, à la diététique, ou encore à l’influence des repas sur le moral et la diplomatie, entre autres.
Une souci du moindre détail
Auguste Escoffier a repensé tous les détails pratiques d’une cuisine, comme la hauteur des plans de travail ou l’installation de chauffe-plats, contribuant au confort et à l’efficacité des chefs.
Une multiplicité de rôles
Escoffier ne fut pas seulement un cuisinier : il fut un stratège, un écrivain, un manager, un innovateur, un organisateur, un créatif. Une pluralité d’intérêts qui, loin de le disperser, a nourri une œuvre cohérente et systémique.
Une capacité à réunir et combiner les contraires
Il a su réunir harmonieusement tradition et innovation, exigence et bienveillance, rigueur militaire et art de vivre, vision d’ensemble et sens du détail. Sur ce dernier point, Il ne se contentait pas de créer un plat, il réfléchissait à la chaîne entière de sa production, de son impact logistique à sa présentation, jusqu’à la perception du client. Dans le même temps, il fut à l’origine d’un grand nombre de codifications, dans les recettes, l’art de la table, ou encore l’art du service, allant jusqu’à tout définir dans les moindres détails.
Un fort besoin d’autonomie et un rejet des systèmes figés
Très jeune, il quitte la cuisine familiale pour suivre sa propre voie ; plus tard, il rompt avec certains dogmes gastronomiques de son époque pour proposer une cuisine plus légère, plus humaine, plus universelle. Et aussi toujours en quête de sens dans tout ce qu’il entreprenait. Autant d’indices de ce fonctionnement atypique.
Comment ses modes de fonctionnement l’ont propulsé au sommet ?
Son aptitude innovatrice : la création du concept de brigade de cuisine
Les talents pluridimensionnels d’Escoffier lui ont permis de révolutionner la cuisine française, et pas seulement par ses recettes. Il a inventé une nouvelle façon de concevoir la cuisine professionnelle comme une entreprise organisée, à travers la création de la fameuse brigade de cuisine, structurée comme une hiérarchie militaire.
Il s’agissait là d’une réponse brillante à un problème complexe : comment garantir l’excellence et la constance d’un service gastronomique dans de grands hôtels internationaux ? Il fallait une pensée systémique, transversale — typiquement multi-potentielle.
Son aptitude à s’associer : son partenariat avec César Ritz.
Auguste comprend bien avant tout le monde l’importance d’associer le raffinement culinaire à l’hôtellerie de luxe, dont César Ritz était le plus grand spécialiste. Ensemble, ils créent les bases de l’hôtellerie moderne, où la table devient un art total. Sa vision stratégique globale, allant du produit à l’expérience client, est encore aujourd’hui enseignée dans les écoles hôtelières du monde entier.
Ce qui est particulièrement marquant, c’est que sa réussite ne fut pas seulement technique, elle fut aussi financière. Grâce à son sens de l’observation et des opportunités, il investit intelligemment, négocie habilement ses collaborations et monétise ses savoirs.
En quoi Auguste Escoffier peut inspirer les multi-potentiels d’aujourd’hui ?
La vie et l’œuvre d’Escoffier rappellent à tous les multi-potentiels que la diversité intérieure n’est pas une faiblesse, mais une richesse à orchestrer. Ce n’est pas en choisissant un seul domaine qu’Escoffier a excellé, mais en embrassant plusieurs dimensions de la cuisine et de l’hospitalité, et en les articulant avec rigueur et vision.
Quelques clés inspirantes à retenir de son parcours :
- Assumer sa pluralité : Escoffier n’a jamais cherché à se restreindre à un rôle. Il a suivi ses intérêts profonds, qu’il a su relier à une mission claire : élever la cuisine au rang d’art et de culture.
- Suivre ses intuitions, et savoir les concrétiser : Il n’était pas seulement inspiré ; il transformait ses idées en structures, en organisations, en méthodologies, pour qu’elles deviennent transmissibles et pérennes. Il a aussi fait confiance à son instinct pour choisir ses partenaires (peut-être a-t-il eu de la chance de croiser le chemin de César Ritz, mais comme le disait Louis Pasteur, La chance ne sourit qu’aux esprits bien préparés)
- Savoir s’appuyer sur ses valeurs : au-delà de sa grande réussite, Escoffier œuvrait pour une gastronomie plus saine, plus élégante, plus humaine, en phase avec ses valeurs. Ces causes lui donnaient de l’énergie pour durer, surmonter les obstacles. Plus encore, elles ont aussi créé de la valeur pour ses clients, et pour la gastronomie toute entière.
Pour aller plus loin
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Cyril Barbé
Cet article m’a été inspiré par le récent documentaire d’Arte sur Auguste Escoffier.
