Les HPI : les talents stratégiques ignorés et masqués de vos entreprises.

En préambule : un sujet qui fait l’objet de mythes et controverses

Comme je l’ai déjà exprimé, je suis très mal à l’aise avec le terme HPI (haut-potentiel intellectuel), qui séparerait les êtres humains en deux camps, ceux qui en sont, et les autres, et qui induirait une forme de hiérarchie. En réalité :

  • Je suis convaincu que tout être humain est doué d’une forme d’intelligence qui lui est propre, et qu’il n’y a aucune espèce de hiérarchie entre ces différentes formes d’intelligences
  • En particulier, il existe une infinité de formes d’intelligences intermédiaires entre les deux, et donc le simple fait de donner un nom (HPI) à certaines personnes est une façon réductrice d’aborder l’humanité.
  • Les tests de QI (sensés déterminer si l’on est, ou pas, HPI), font l’objet de nombreuses controverses, et biais de mesure.

Néanmoins, ce sigle est bien pratique pour aborder ce sujet, à savoir les aptitudes très originales qu’ont certains être humains : détecter les signaux faibles, avoir des intuitions pertinentes sur le futur, une créativité et capacité d’innovation hors normes, détecter, gérer, simplifier la complexité, faciliter l’intelligence collective, entre autres.

Les pays anglo-saxons en avance sur nous à ce sujet

Un mythe couramment répandu est de dire que c’est un sujet dont on ne parle pas ou peu dans les pays anglosaxons. En réalité, on en parle depuis longtemps, et c’est sans doute pour cela que ce sujet passe plus inaperçu : il est devenu la normalité. Je prendrai pour exemple cet article de Gary P. Pisano dans le Harvard Business Review en mai 2017, intitulé « La neuro-diversité comme avantage compétitif ».

Il y dit notamment ceci : « Un nombre croissant d’entreprises, dont SAP, Hewlett Packard, Microsoft, Ford, E&Y, Dell Technologies, ont fait [ou commencent à faire] évoluer leurs processus RH afin de mieux intégrer et valoriser les talents de la neuro-diversité, et ont constaté des gains de productivité, une amélioration de la qualité, une augmentation de la capacité d’innovation, et un engagement accru des employés. »

Il cite aussi les éléments majeurs mis en place par ces entreprises dans ce but, dont notamment :

  1. Travailler en partenariat avec des associations et professionnels expérimentés dans la neuro-diversité
  2. Pour les collaborateurs concernés, adopter en interne des processus d’évaluation spécifiques
  3. Former l’ensemble des managers et collaborateurs à une meilleure connaissance du fonctionnement spécifique des personnes concernées
  4. Mettre en place un système d’accompagnement individuel des personnes concernées
  5. Adapter les méthodes de gestion des carrières à ces personnes [NDR : qui le plus souvent sont absentes des strates les plus hautes de la hiérarchie]

Il ajoute enfin : « Le travail des gestionnaires [RH] sera plus difficile, mais les bénéfices pour les entreprises seront considérables« .

Un programme d’accompagnement qui fait progresser TOUS les collaborateurs

Il dit aussi : « L’avantage le plus surprenant est peut-être que les dirigeants et DRH ont, à cette occasion, fait évoluer leur gestion des talents de tous les employés, grâce à une plus grande adaptation aux besoins individuels. SAP par exemple s’est attachée à « mieux connaître chaque collaborateur, afin de mieux savoir comment la gérer », explique Silvio Bessa, VP senior des services numériques aux entreprises. « Cela a fait de moi un meilleur manager, sans aucun doute. »

Pour ma part, j’ajoute que les HPI ayant une forte empathie et sensibilité, ils contribuent naturellement au bien-être des collaborateurs et un esprit coopératif. Et en valorisant et encourageant cette attitude des HPI, les entreprises vont indirectement contribuer à tous leurs collaborateurs.

On voit donc bien à quel point ces programmes d’accompagnement de la neuro-diversité, et en particulier des HPI, contribuent à faire progresser l’ensemble de l’entreprise qui s’y engage, avec des résultats durables qui concernent donc TOUS les salariés.

Des talents le plus souvent invisibles et non repérables au sein des organisations

Les HPI ont tellement envie d’être acceptés des autres, intégrés comme des équipiers « comme les autres », qu’ils s’adaptent en permanence aux modes de fonctionnement des autres comme de véritables caméléons. Et comme ils acceptent mal leurs différences, ils cherchent en permanence à la masquer.

Par ailleurs, ils considèrent que s’afficher comme HPI serait un total manque d’humilité, une valeur très importante pour eux, serait contraire à cette vision de « continuité des formes d’intelligences » dont je parle en introduction, et enfin, constituerait un risque pour eux d’ostracisation et d’isolement.

C’est la raison pour laquelle autant de HPI se refusent à passer un test de QI (en plus des biais que je cite plus haut), ignorent leur spécificité, et/ou ne s’affichent surtout pas.

Je rencontre un grand nombre de HPI qui se découvrent vers la cinquantaine, grâce au fait que leurs enfants ont été détectés HPI à l’école ou via un expert spécialisé, qui leur suggère de se faire détecter à leur tour.

Un HPI ne parle quasiment jamais de sa spécificité, plus encore, il l’ignore dans une grande partie des cas. D’où l’importance de former les équipes RH et l’ensemble de l’encadrement pour les détecter, et ensuite mettre en œuvre un management adapté.

Les entreprises françaises aussi « intelligentes » que les anglo-saxonnes

Quand je cite cet expert anglo-saxon, et son article concernant les entreprises américaines, je ne suis pas en train de dévaloriser la France comme étant toujours à la traîne des meilleurs. Je suis convaincu au contraire que nos entreprises et nos dirigeants en France sont au moins aussi « intelligents » que là-bas. Il leur manque juste les bonnes informations et compétences en la matière.

C’est la raison pour laquelle de plus en plus d’experts français, comme par exemple Myriam Ogier ou Liliya Reshetnyak, fondatrice de Hipip’In, consacrent leur énergie à relayer et transmettre ces compétences.

L’exemple d’Ubisoft : les neuro-atypiques ont des « compétences exceptionnelles »

Les neuro-atypiques, dont les HPI font partie, s’adaptent particulièrement bien aux domaines du numérique, et en particulier dans l’industrie des jeux vidéo et de l’intelligence artificielle. Pierre Escaich, Directeur Talents Neurodiversité d’Ubisoft, explique que « les neuro-atypiques font preuve d’une grande créativité, de beaucoup d’imagination. Leur capacité à voir en 3D est supérieure à la moyenne. Ils voient avec des scènes, des couleurs, des filtres différents. Les autistes surtout, sont capables d’intégrer beaucoup d’informations et de détecter des schémas. C’est tout sauf un handicap ! »

Il a été nommé à ce poste après avoir spontanément créé un groupe d’échange sur la neurodiversité (une initiative comme on en voit dans un nombre croissant d’entreprises), qui rassemble aujourd’hui 450 personnes dans une quinzaine de pays.

Bien sûr, ces talents exceptionnels ne pourraient être visibles sans l’existence même de cette fonction officiellement créée au sein d’Ubisoft. Et pour que cette fonction soit efficace, il faut qu’elle soit pilotée par des profils neuro-atypiques, et qu’elle fasse appel à des experts de l’accompagnement de ces profils.

Pour en savoir plus à ce sujet, participez à mes Masterclass sur ce sujet. Prochaine date mercredi 12 juillet à 18h00.

Infos et inscriptions : https://www.lecampus.online/conferences/cyril-barbe-2

Et si vous voulez prendre rendez-vous avec nous, c’est ici.

Cyril Barbé

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