Être HPI dans le monde du travail : avantages et inconvénients
Les HPI sont reconnus pour avoir une rapidité de réflexion hors normes, une forte capacité à se remettre en cause et à apprendre, une excellente vision à long terme, combinée avec une capacité de travail et d’action hors normes (quand ils sont motivés), et une empathie surdéveloppée, et donc une forte capacité d’adaptation, et une forte conscience du niveau de bien-être dans leur entité.
Pour autant, une bonne partie d’entre eux a de réelles difficultés à s’intégrer harmonieusement dans leur environnement de travail, et donc à s’y épanouir pleinement.
Il en va de même pour ceux qui sont en situation de management d’équipes : les managers HPI ont à la fois de réels atouts pour bien manager, sont d’ailleurs très aptes à innover dans ce domaine, et ainsi à s’adapter aux nouveaux enjeux, en particulier celui du recrutement et de la fidélisation des jeunes générations. Mais dans le même temps, ils ont des zones aveugles qui les conduit à avoir parfois des attitudes inadaptées vis-à-vis de leurs collaborateurs.
Les atouts des managers HPI
D’abord, ils ont une empathie surdéveloppée, qui les conduit à facilement ressentir le bien-être ou le mal-être de leurs collaborateurs, et donc, y remédier de façon adaptée et avec suffisamment d’anticipation.
Ensuite, leur sensibilité émotionnelle fait que – en général (*) – ils ont une intelligence émotionnelle assez développée. Ils comprennent donc, plus vite que la moyenne, la nature des émotions vécues par leur entourage, et comment les aider à les gérer efficacement.
(*) La limite de cette observation est que, dans certains cas, ayant subi des vagues émotionnelles trop importantes par le passé, ils se sont coupés d’une partie de leurs émotions, et ainsi ne peuvent plus s’en saisir.
Ils ont aussi une capacité à naviguer entre vision long terme et action immédiate, ce qui leur permet d’anticiper les éventuelles crises, savoir comment s’y préparer au mieux, et aider leurs collaborateurs à faire de même.
Ils ont aussi une forte capacité de remise en cause personnelle, et d’apprentissage. Cela les conduit à s’améliorer en permanence, ou à chercher à le faire, sur la base des observations des autres, en particulier celles de leurs collaborateurs, auxquelles ils sont très attentifs.
Par ailleurs, leur éclectisme et curiosité naturelle les conduit à avoir une forte ouverture d’esprit, et une certaine capacité d’écoute, des qualités reconnues essentielles pour un manager aujourd’hui dans un monde aussi mouvant.
Leur créativité naturelle leur permet aussi d’imaginer des solutions originales et décalées dans un grand nombre de situations, même les plus complexes et délicates. C’est un réel atout pour développer sa résilience, et celle de ses équipes
Enfin, ils ressentent un besoin d’utilité très développé, ce qui les conduit souvent à œuvrer pour le bien commun (parfois même au détriment de leur propres intérêts), et donc à favoriser l’esprit collaboratif et l’intelligence collective au sein de leurs équipes.
Toutes ces qualités combinées sont particulièrement utiles dans un monde d’incertitude et de complexité (VUCA) tel que nous le vivons tous de plus en plus : ce n’est d’ailleurs pas par hasard que les recruteurs sont désormais très friands de ces profils atypiques.
Les zones aveugles des managers HPI
Parallèlement, malgré leur forte empathie, ils peuvent dans certains contextes avoir des attitudes inadaptées, voire malmenantes, pour leurs équipes. D’abord, ce peut être le cas s’ils se sont coupés de leurs émotions. Mais aussi du fait de leur [trop] haut niveau d’exigence, dont ils n’ont en général pas conscience.
Ensuite, leur vitesse de réflexion et d’exécution font qu’ils ont tendance à facilement larguer leurs équipes, qui ne peuvent pas toujours les suivre dans leur cheminement intellectuel, d’autant qu’ils ont tendance à sauter des étapes dans leurs explications. Dans certaines situations, cette vitesse peut être perçue par leurs collaborateurs comme une façon d’asseoir leur « pouvoir de chef », ce qui n’est absolument pas le cas, mais qui renforce leurs difficultés relationnelles.
Leur vitesse naturelle peut également les conduire à une forme d’impatience, qu’ils vont exprimer de façon forte et très spontanée, et là aussi être perçue négativement par leurs collaborateurs.
A cette vitesse s’ajoute leur pensée en arborescence, qui les rend aussi difficile à suivre et à comprendre. Et malgré leur forte empathie, ils ont du mal à percevoir que la majeure partie des autres personnes qu’eux ont un raisonnement plus linéaire et direct, et ne raisonnent donc pas du tout de la même façon.
Ensuite, leur haut niveau d’exigence, parfois poussé à l’extrême, peut être totalement inadapté à certaines personnes, qui se sentent bousculées, mises en permanence en situation d’inconfort et sur la sellette.
Enfin, leur éclectisme et créativité débordante les conduit à vouloir mener en parallèle un grand nombre de projets, d’objectifs, en en abandonnant au passage un grand nombre en cours de route, avant même d’avoir pu les investiguer suffisamment. Cette attitude peut donner le sentiment d’un grand éparpillement à leurs collaborateurs, et surtout d’un manque de persévérance et de constance dans les décisions et actions, ce qui peut être très préjudiciable à leur crédibilité de manager.
D’une façon générale, le paradoxe est que les managers HPI sont souvent surpris de la perception que leurs collaborateurs ont d’eux, alors même qu’ils sont pourtant très attentifs aux autres. D’une certaine façon, ils sont d’autant moins conscients d’eux-mêmes qu’ils sont particulièrement conscients des autres.
Mon expérience personnelle de manager
Pour ma part, ce sont le haut niveau d’exigence et l’impatience qui ont été à l’origine de mes difficultés personnelles en tant que manager. Il m’est arrivé il y a une quinzaine d’années d’entendre une de mes collaboratrices dire (par une autre personne interposée) qu’elle avait peur de moi, tant ce niveau d’exigence était trop haut placé dans son cas. J’ai été abasourdi par cette information, car je me percevais alors comme un manager très à l’écoute et très empathique, en particulier avec elle que je sentais un peu plus fragile que les autres.
Ma sensibilité ne m’a pas empêché d’être totalement sourd à ses émotions, au point de la rendre incapable de me les exprimer en face à face. Ce fut pour moi une prise de conscience brutale, et la remise en cause fut d’autant plus difficile, que je suis plutôt très à l’écoute des signaux faibles et que je me fais donc rarement surprendre ainsi.
Un manque de reconnaissance de la part de leur hiérarchie
Les managers HPI ont donc de vrais talons d’Achille, qui sont en général facilement perçus par leur hiérarchie, ce qui ne contribue pas à leur carrière. De plus, leurs quelques réussites, en général brillantes et rapides, peuvent générer jalousie et incompréhension autour d’eux. Ces deux facteurs combinés font que les managers HPI sont rarement reconnus comme des managers fiables, dignes d’évoluer positivement dans l’organisation.
Comment devenir un manager performant et reconnu comme tel ?
Pour un HPI donc, la clé pour devenir un manager performant, est d’abord de prendre conscience de ses différences de fonctionnement fondamentales avec la plupart des autres personnes. Et c’est une prise de conscience d’autant plus difficile que les HPI pensent en général savoir très bien capter ce genre de choses, et apprendre à progresser dans leurs attitudes.
En effet, leur fort besoin d’intégration et d’acceptation par les autres, leur forte capacité d’adaptation, font qu’ils ont tendance à vouloir imiter les modes de fonctionnement des autres, mais qu’ils ne leur conviennent pas du tout. Ce faisant, ils doivent fournir des efforts continus importants pour tenter de « se fondre » dans ce moule qui ne leur correspond pas, ce qui les freine pour exprimer pleinement leurs pleins potentiels.
Cette prise de conscience, et acceptation de leur différence, constitue la clé principale de leur future réussite en tant que manager, car par ailleurs, ils ont une forte capacité de remis en cause et d’apprentissage, dès lors qu’ils disposent des bonnes informations.
Cette prise de conscience leur servira aussi à mieux comprendre les perceptions de leur hiérarchie, leurs collatéraux et collaborateurs, et ainsi à éviter la jalousie, les quiproquos, malentendus, et ainsi à être pleinement reconnus pour leurs aptitudes particulières de manager.
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Cyril Barbé